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Mathématiques

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Histoire des travaux mathématiques de Sophie Germain

par H. Stupuy

L'entrée dans le monde des savants

L'enfance

"Mademoiselle Germain (Marie-Sophie), naquit à Paris, rue Saint-Denis - l'acte de naissance ne porte point de numéro - le 1er avril 1776, de Ambroise-François Germain et de Marie-Madeleine-Gruguelu."
 "Ainsi, née l'année même du renvoi de Turgot, c'est-à-dire au seuil de la révolution, Sophie Germain reçut dès sa plus tendre enfance, dans les conversations qu'elle entendit chez son père, l'influence de la vigueur intellectuelle que le dix-huitième siècle manifestait alors; que si une inclination naturelle la porta aux études mathématiques, la philosophie scientifique dont elle vit l'éclosion laissa dans son esprit une empreinte ineffaçable."

La vocation pour les mathématiques

Archimède 287 av JC- 212 av JC"La manière dont elle fut avertie de sa vocation mathématique mérite d'ailleurs d'être rapportée.  C'était en 1789. L'agitation Sophie germainrévolutionnaire éclatait de toutes parts et, déjà, à l'âge de treize ans, avec la sagacité dont elle devait donner tant de preuves plus tard, Sophie Germain comprenait et, a-t-on dit, prédisait l'étendue et la durée d'un mouvement en lequel beaucoup ne voulaient voir qu'une tourment passagère. Désireuse de se choisir une occupation assez sérieuse pour faire diversion à ses craintes, elle passait de longues heures dans la bibliothèque de son père. Un jour, par hasard, elle ouvre l' Histoire des Mathématiques de Montucla, et en ce livre plein d'érudition, trouve le récit éloquent de la mort d'Archimède: ce grand homme, occupé à réfléchir sur une figure géométrique, les yeux et la pensée tout entiers à cette méditation, ne s'aperçoit ni de la prise de Syracuse, ni du bruit des vainqueurs qui saccagent la ville, ni du glaive levé sur lui, et il tombe sans daigner répondre aux brutales injonctions de son assassin. Aussitôt le choix de la jeune fille est fait. Cette science géométrique si attachante que rien n'en peut détourner, pas même une menace de mort, cette science dont elle connait à peine le nom, voilà bien ce qui lui convient; et, sur l'heure, elle prend la résolution héroïque de s'y donner complètement. "


La passion pour les mathématiques.

Leonhard Euler 1707-1783"... Sans autre guide qu'un Bezout; seule, dépourvue de conseils, elle se met à étudier tout ce qu'elle a sous la main, pénètre, devine,Isaac Newton 1643-1727 s'intéresse, se passionne: c'est un labeur de jour et de nuit, c'est une ardeur telle que sa famille s'en effraie.  On essaya d'abord d'entraver son goût (...) Alors, pour la forcer à prendre le repos nécessaire, on retire de sa chambre le feu, les vêtements, la lumière. Elle feint de se résigner; mais, quand la famille est endormie, elle se relève, s'enveloppe de couvertures et, par un froid tel que l'encre se gèle en son écritoire, se livre à ses chères études. Plusieurs fois on la surprit ainsi le matin, transie de froid sans s'en être aperçue. Devant un volonté si extraordinaire pour son âge, on eut la sagesse de laisser la jeune Sophie disposer à son gré de temps (...) Quoi qu'il en soit ses progrès furent rapides et, bientôt, elle se trouva en état son d'étudier avec fruit le calcul différentiel de Cousin (...) Mais alors, et précisément  à cause de ses progrès, une nouvelle difficulté se présenta; il lui devint indispensable de connaitre et d'approfondir des ouvrages de science écrits en latin, et elle n'entendait point cette langue; en ceci encore Mlle Germain ne prit secours de personne et, seule, elle se rendit capable de lire Euler et Newton. "


L'École polytechnique et Lagrange.

LagrangeLagrange 1736-1813" Et il (Fourcroy, ndlr)  propose l'établissement de cette Ecole centrale des travaux publics qui, un an plus tard, prit le titre d' École polytechnique. L'École, immédiatemment organisée, eut pour premiers professeurs, entre autres, Lagrange, Prony, Monge, Fourcroy, Vauquelin, Berthollet, Chaptal, Guyton de Morveau, toute une pléiade d'hommes supérieurs. Sophie Germain avait alors dix-huit ans.  Frappée de l'utilité d'un enseignement que son sexe lui interdisait de suivre en personne, et voulant du moins en profiter, elle se procura les leçons de divers professeurs, spécialement les cahiers de la chimie de Fourcroy, ceux de l'analyse de Lagrange. Elle fit plus. Une habitude s'était établie parmi les élèves de présenter aux professeurs, à la fin des cours, des observations par écrit; sous le nom supposé d'un élève de l'École - Le Blanc, pseudonyme dont elle se servit pendant quelque temps, - elle envoya les siennes à Lagrange. Celui-ci les remarqua, en fit publiquement l'éloge, s'informa du véritable auteur et, l'ayant connu, devint le conseiller et  l'appui de la jeune mathématicienne.
Les circonstances originales de son apparition, l'approbation de l'illustre auteur de la Mécanique analytique, l'âge de la nouvelle géomètre,  quelques détails sur ses commencements qui transpirèrent, tout cela fit du bruit, piqua la curiosité, provoqua la sympathie; on s'étonna, on s'intéressa, et aussitôt Mlle Germain se trouva en relations, soit directes, soit épistolaires,  avec tous les savants connus de l'époque.
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